1.) La France déchirée
Dans le royaume de France, la guerre oppose depuis presque cent ans les Français aux Anglais. Le nouveau roi d'Angleterre, Henri V de Lancastre, menace de débarquer. Charles VI, le roi de France, ne peut résister, car, depuis 1392, il est devenu fou. Les princes français les plus puissants exercent le pouvoir á leur profit.
En 1407, le frère du roi, Louis d'Orléans est assassiné par le duc de Bourgogne. Ces ambitions rivales conduisent á une véritable guerre civile qui oppose les Armagnacs aux Bourguignons. Chacun appelle les Anglais á son secours.
Á Azincourt, le 25 octobre 1415, les Anglais sont victorieux de la noblesse française.
En 1419, le duc de Bourgogne, Jean sans Peur, est á son tour assassiné. Son fils, Philippe le Bon, s'allie aux Anglais.
En 1420, au traité de Troyes, le royaume de France est promis au roi d'Angleterre. Or, Charles, le dauphin, fils de Charles VI, veut exercer le pouvoir.
Á Bourges, il organise une armée et une partie des officiers royaux le suit. Il trouve des appuis dans le Sud et dans quelques îlots au nord, comme le
Mont-Saint-Michel qui résiste aux attaques des Anglais et des Bourguignons. Aucune bataille n'est décisive. Le pays souffre de la famine, de la guerre, de la peste et du poids de lourds impôts.
2.) L'enfance de Jeanne d'Arc
Jeanne d'Arc est née, sans doute le 6 janvier 1412 á Domrémy, dans un petit village situé à l'est du royaume de France. Ses parents sont des laboureurs, c'est-à-dire des paysans aisés. Jeanne d'Arc partage avec sa sour et ses 3 frères le sort de nombreux enfants du royaume. Elle aide á son père á garder les moutons, les siens et ceux des voisins. Elle apprend avec sa mère á filer et á coudre. Sa mère, Isabelle
Romée - ainsi appelée parce qu'elle avait fait le pèlerinage á Rome - est très pieuse. Elle lui enseigne les principales prières de l'Eglise : le Pater, l'Ave Maria et le Credo.
Jeanne ne sait probablement ni lire ni écrire , mais, le dimanche, elle assiste avec les siens á la messe, dans l'église de sa paroisse.
Á Domrémy, comme ailleurs au Moyen - Age, la communauté villageoise et la famille sont des refuges où s'égrènent, au rythme des saisons, les joies et les peines quotidiennes. Là aurait du se dérouler la vie de Jeanne d'Arc.
3.) La mission
Jeanne a 13 ans. Pieuse, elle fréquente assidûment l'église de sa paroisse où elle aime se confesser et communier fréquemment. Elle écoute aussi les sermons du curé et des prédicateurs des ordres mendiants, tels les franciscains, qui engagent à se rapprocher de la Vierge et du Christ.
Un jour de jeûne et de prières, Jeanne s'est retirée dans le jardin de son père. Elle croit entendre une voix qui lui apparaît tout auréolée de lumière. C'est l'archange saint Michel. Il lui commande de se bien conduire et de quitter son village pour chasser les Anglais hors du royaume. Jeanne a peur. Comment le ferait-elle , elle qui ne sait pas tenir une épée ? Mais les voix de sainte Marguerite et de sainte Catherine se joignent à celle de saint Michel pour la convaincre de sa mission. Une fois la première frayeur passée, Jeanne recherche la présence de ses voix.
4.) Chinon
La petite troupe met une dizaine de jours pour atteindre Chinon dans la vallée de la Loire où réside le dauphin. Les nouvelles du siège d'Orléans sont alarmantes. Le dauphin Charles, d'un caractère taciturne, se sent désemparé. Il n'a plus assez d'argent pour payer la solde de nouveaux gens d'armes. Quelle décision prendre ? Quel conseil écouter ?
Alors, Charles apprend que Jeanne arrive. Sa renommée est déjà grande. Jeanne, de son côté, n'a jamais vu le dauphin, mais elle est sûre de le reconnaître entre tous. Elle a raison. Quand elle pénètre dans le château, elle se dirige droit vers lui et le salue. Puis, à l'écart de la cour, ils discutent tous deux longuement.
Charles est d'accord. Il a repris de confiance, mais il se méfie encore. Alors il fait interroger Jeanne par des clercs. Tous déclarent qu'elle est une envoyée de Dieu. La tâche de Jeanne commence.
5.) Première victoire
Grande, bien bâtie, les cheveux coupés court, Jeanne ne quitte guère son habit de soldat. Elle est impatiente de délivrer Orléans. Mais comment venir à bout des fortifications construites par Jean Talbot et les Anglais pour assiéger la ville ? Lors de la « journée des Harengs » - la journée des Harengs était le 12 février 1429. le nom est donné à la déroute des Français devant les Anglais commandés par Falstaff. Celui-ci accompagnait un convoi de vivres dont 300 harengs destinés à nourrir les assiégeants pendant le carême. La déroute française serait due au désordre de son attaque - les Français ne réussissent destiné à l'ennemi.
Mais dans la ville, les habitants crient famine. Dunois, le demi-frère de Charles, est prêt à capituler. Jeanne s'entête. Par ruse, elle réussit à détourner l'attention des Anglais et à pénétrer dans la ville. La population, réconfortée, l'acclame. Derrière son étendard, les troupes françaises retrouvent leur courage perdu. D'abord, Jeanne somme les ennemis de se rendre : ils répondent par des moqueries. Alors, aidée de valeureux hommes d'armes, tel le fidèle La Hire, Jeanne poursuit les Anglais de bastille en bastille. Au bout de 8 jours, seule résiste l'énorme bastille de Tourelles. Pendant l'assaut, Jeanne est blessée. Une flèche d'arbalète pénètre son épaule. Qu'importe ! Elle continue à se battre. Devant tant d'acharnement, les Anglais, pris de panique, fuient.
Orléans est délivrée.
6.) Charles est enfin roi
Jeanne veut ouvrir la route vers Reims, la ville où sont sacrés les rois. Folle entreprise, disent les capitaines ! Le pays est aux Bourguignons. Il vaut mieux délivrer la Normandie. Jeanne refuse de les écouter. Elle dit qu'il faut que le dauphin devienne roi, alors il sera le lieutenant Dieu dans le royaume de France. Charles finit par accepter.
Les gens d'armes accourent auprès de Jeanne pour la soutenir dans son entreprise. Aidée de duc d'Alençon, elle nettoie en un temps record la vallée de la Loire. Elle se dirige ensuite vers le nord du royaume. Mais les bourgeois de Troyes, ralliés aux ennemis, refusent de la laisser passer. Charles est prêt à abandonner. Jeanne ordonne de préparer l'assaut. La ville, effrayée, se rend. Et ainsi toutes les villes jusqu'à Reims.
La cérémonie est organisée à la hâte. On emprunte une couronne, un sceptre, et des vêtements. De nombreux nobles et prélats sont absents. Mais le roi reçoit l'onction avec l'huile de la Sainte Ampoule qui a servi pour ses prédécesseurs ;
17 juillet 1429 Charles est enfin devenu Charles VII. Jeanne a gagné.
7.) Le temps perdu
Le roi cherche la paix avec le duc de Bourgogne en même temps qu'il tente d'investir les places fortes du nord de royaume.
Ses conseillers sont divisés. Le roi hésite. Georges de la Trémoille, fourbe et corrompu, se méfie de Jeanne d'Arc. L'élan est brisé. Avec de faibles moyens, Jeanne décide de prendre Paris par surprise. 8 septembre 1429 elle rencontre, blessée à la jambe, une population violemment hostile.
Le roi ordonne la retraite et l'armée, repliée au sud de la Loire, se disloque. Jeanne se sépare de ses compagnons d'armes, de valeureux capitaines, Gilles de Rais, le duc d'Alençon, Dunois et La Hire. Pour la remercier, le roi l'anoblit ; en fait il abandonne.
Avec quelques hommes d'armes , elle est chargée de lutter contre les Bourguignons. Mais la ville de la Charité-sur-Loire résiste et Jeanne doit lever le siège car elle est sans argent et sans vivres. Malgré ses échec militaires, Jeanne reste très populaire. Les penseurs politiques qui croient que le royaume peut encore être sauvé voient en elle un soleil qui luit. Les gens du peuple disent qu'elle fait des miracles et ils affluent sur son passage. Des clercs, comme frère Richard, la donnent en exemple dans leurs sermons. Conseillée par son chapelain, frère Pasquerel, et confiante dans ses voix, Jeanne attend.
8.) Jeanne captive
A la fin de l'hiver 1429, le duc de Bourgogne, Philippe le Bon, se prépare à l'offensive malgré les trêves passées avec le roi. Il veut reprendre la Champagne et la Brie qui se sont ralliées à Charles VII. Le siège est mis devant Compiègne. Jeanne est lasse d'attendre. L'entourage royal se méfie d'elle. Son prestige est trop grand.
Jeanne décide de se joindre à une petite troupe d'environ 150 soldats.
Après avoir erré un mois, elle décide de secourir les troupes royales, enfermées dans Compiègne.
Un matin, en passant la forêt, Jeanne réussit à entrer dans la ville. Le soir même, c'était le 23 mai 1430, elle tente une sortie. Au retour, sa troupe est débordée. Sur le pont qui mène à la ville les soldats bourguignons l'attendent.
Jeanne est prise. Jean de Luxembourg, qui commande les opérations pour le duc de Bourgogne, triomphe.
Il fait enfermer Jeanne de forteresse en forteresse, jusqu'au solide donjon de Beauvoir.
Plusieurs fois, au péril de sa vie, Jeanne tente de s'échapper. En vain.
9.) En prison
Avant d'être faite prisonnière, Jeanne d'Arc disait souvent : « Je préfère mourir plutôt que de tomber aux mains des Anglais. » C'est pourtant ce qui lui arriva. Aussitôt prise par les Bourguignons, les Anglais tentent de la racheter. Après avoir longtemps hésité, Jean de Luxembourg finit par livrer Jeanne contre l'énorme somme de 10 000 écus d'or. Elle st alors transférée dans un prison de Rouen. Elle n'a pas une chance de s'échapper parce qu'elle est mise en fers et des soldats anglais la gardent nuit et jour en se moquant d'elle. Pour se protéger, Jeanne conserve son habit d'homme. Elle désobéit ainsi la loi qui interdit aux femmes de porter de tels vêtements Ses juges le lui reprochent, mais elle s'obstine. C'est son seul moyen de défense contre l'injustice. En effet, elle aurait dû être détenue dans un prison d'Eglise puisque son crime est religieux ; la garde y est moins sévère. Elle aurait dû pouvoir se confesser et recevoir la communion. Tous ces droits lui sont refusés. Jeanne est seule.
10.) Devant les juges
Les procès de Jeanne sont de 21 février jusqu'au 28 mai 1431.
Jeanne est seule pour tenir tête au tribunal qui est chargé de juger de sa foi selon les méthodes de l'Inquisition. Le roi ne fait rien pour la sauver. Il considère peut-être que, comme beaucoup d'autres prophètes, Jeanne n'est qu'une illuminée. N'a-t-elle pas échoué à Compiègne ? Or, le tribunal est redoutable. L'évêque de Beauvais, Pierre Cauchon, chargé de diriger le procès, est favorable aux Anglais. Il est décidé à faire disparaître celle qui a permis le sacre de Charles VII. Les autres juges, une centaine, soigneusement choisis, sont du même avis. Presque tous sont des universitaires venus de Paris. Ils ont fait de longues études. Ils ont appris les subtilités de la foi et des lois. Comment ces savants peuvent-ils comprendre Jeanne ? Pour eux aussi, Jeanne est une illuminée qui refuse de se soumettre aux autorités de l'Eglise. C'est une rebelle. Et Jeanne, pour se défendre de ce filet qui l'étouffe, n'a pas d'autres secours que de s'entretenir directement avec Dieu. Ses voix ne la quittent guère. Jeanne a choisi d'être rebelle.
11.) Jeanne accusée de sorcellerie
Quand le tribunal pose des questions sur les voix ou sur le signe que reçut Charles VII à Chinon, Jeanne répond : » Passez outre . ».
Irrités et inquiets de tant d'audace, les juges pensent que Jeanne se méfie d'eux et de l'Eglise parce qu'elle est une envoyée du diable. 27 mars 1431 on la jugeait indocile, on la suspecte maintenant d'hérésie. Où trouver les preuves de sa sorcellerie ? Dans son enfance, ne s'égarait-elle pas volontiers dans les bois où règnent sans partage les fées ? Ne croyait-elle pas aux sortilèges comme tant de paysans illettrés Mais Jeanne raconte les jeux innocents des jeunes filles autour de l'arbre de mai. Elle raconte comment elle n'a jamais cru qu'à la fontaine de Domrémy, des malades ont été guéris. Et puis, cet étendard qui lui a permis de rallier tant de soldats, n'était-il pas enchanté ? Jeanne n'y a jamais songé. Tout ce qu'elle a fait, c'est obéir à ses voix. Si elle a péché par orgueil, c'est sans le vouloir. Dieu seul jugera.
12.) Le supplice
Jeanne se défend : mais le procès est long. Elle ne peut pas savoir que dans le royaume de nombreux Français ont choisi de lutter contre les Anglais. La solitude, la peur, les jeûnes ébranlent sa volonté. Les juges les plus hostiles la harcèlent jusque dans sa prison. En public elle doit entendre de longs discours solennels qui tentent de la persuader de ses erreurs. Traînée au cimetière de Saint-Ouen, Jeanne est sommée de renoncer à ses voix et de obéir à l'Eglise.
Jeanne cède ; elle signe.
Elle promets aussi de reprendre des habits de femme. Mais quelques jours plus tard, Jeanne s'est ressaisie. En habit d'homme, elle tient tête à Pierre Cauchon sur ordre de ses voix. Tous les membres du tribunal, convoqués à la hâte, déclarent qu'elle est retombée dans l'erreur ; elle est relapse et doit être brûlée.
Pierre Cauchon se réjouit. « Faites bonne chère, dit -il aux Anglais, c'est fait. « Le bûcher est dressée. Jeanne a peur ; elle réclame une croix. Les Anglais, le peuple et le bourreau sont en larmes. Alors se répand la nouvelle que Jeanne est morte en martyre. Jeanne d\'Arc est brûlée le 30 mari 1431.
13.) Jeanne réhabilitée
Jeanne d'Arc, de son vivant, n'a pas réussi à ce que Charles VII exerce son métier de roi. Mais, après sa mort, la crise s'estompe. En 1435, à Arras, la paix est faite avec le duc de Bourgogne. La Champagne et l'Ile de France se rendent au roi tandis que Paris redevient la capitale de royaume. Mais les Anglais résistent et le pays est livré aux terribles bandes des Ecorcheurs.
La résistance nationale s'affermit contre les ennemis. En Normandie, des paysans attaquant les hommes d'armes et se soulèvent contre les Anglais. A Paris des complots tentent de livrer la ville aux Français. En vain. Il faut un pouvoir fort. Charles VII écarte ses anciens conseillers. Il décide de réorganiser l'armée. Il reprend la Normandie, entre à Rouen et, au 17 juillet 1453, sa victoire, à Castillon met fin à la guerre.
Dans les campagnes pacifiées, les impôts rentrent sans contestation. La nation rassemblée célèbre son roi qui, en triomphateur, fait son entée dans les villes. En 1455, à la demande de la mère de Jeanne d'Arc, Charles VII accepte d'ouvrir, à Paris un nouveau procès qui déclare le premier nul.
A Rouen, le 7 juillet 1456, Jeanne est réhabilitée. Héroïne nationale, puis sainte - elle est canonisée en 1920 - Jeanne devient un modèle.
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